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trompé et qui ont trahi Rome. Face à cette attitude, il se raidit pour former un rempart, avec sa soif de

culture, épris d’hellénisme, il écrit en grec, la langue véhiculaire de la partie orientale de l’Empire.

Intrigué par les cultes païens, en particulier les rites initiatiques d’Éleusis ou de Mithra, il veut créer un

synchrétisme polythéiste pour l’opposer au christianisme et à ses schismes (Arianisme de Constance

II). Stratège malgré lui, quand il est nommé César en 355 et lors de la campagne de 357 devant

Strasbourg. Il l’est encore à Lutèce (Paris) quand il est proclamé auguste en février 360 et quand il décide

d’affronter son cousin, Constance II, en 361, avant la mort program-

mée de l’auguste en novembre 361.

Suivent vingt mois de règne où le nouvel Auguste se trouve trans-

formé, transfiguré. Tel un nouvel Alexandre, il veut tout changer, tout

réformer, il fait l’inverse de Constantin Ier en 313, lors du rescrit de

Milan, il proclame un Édit de Tolérance qui replace Christianisme et

Paganisme sur un pied d’égalité, entame des réformes administratives,

juridiques et judiciaires, entame une « chasse aux sorcières » de l’appa-

reil administratif, organise un nouveau paganisme, veut créer, à l’image

d’un Aurélien, un nouveau culte solaire. Enfin, il reprend à son compte

les rêves de conquête vers l’Orient et de

lutte contre l’ennemi héréditaire que sont les Sassanides avec leur roi

Sapor II (309-379) qui nargue les Romains depuis si longtemps et a

même tenu en échec Constantin Ier le Grand. Pour nous numismates, il

entreprend une réforme monétaire, passée pratiquement inaperçue, qui

aurait eu un retentissement si il avait vécu.

Le maître mot, c’est Réformateur. Julien est un rénovateur de la Société

traditionnelle romaine. Il veut sortir l’Empire de la léthargie dans la-

quelle il s’est laissé enfermé. C’est le rêve brisé, l’incompréhension de

ses contemporains, voire de ses amis qui peinent à le suivre, à le comprendre. Julien va trop vite, il

méprise trop les absurdités d’un monde dont il s’est coupé, d’abord involontairement par les années

d’exil, puis volontairement par des choix qui vont s’avérer désastreux. Benoist-Méchin évoquait le «

rêve calciné ». Je lui préfère celui de « rêve brisé », brisé par une javeline, peut-être romaine qui le

cloue comme son adversaire, Jésus, dont il n’était pas l’ennemi, dans une mort oubliée à trente-deux

ans aux portes du désert, victorieux et vaincu !

Il ne restait plus à ses ennemis et ses adversaires qu’à le faire entrer dans l’oubli. Ils ont failli réussir.

Mais en voulant le faire disparaître, ils l’ont grandi. Julien est entré dans la légende ! L’aposthasie fait

de l’empereur philosophe néo-platonicien l’une des figures les plus attachantes de la fin de l’Anti-

quité, un chant du cygne de la Romanité. Vous l’aurez compris, Julien est mon empereur favori, il

partage cet autel avec Hadrien et il s’en est fallu de peu pour que l’un de mes trois fils ne porte le

prénom de l’empereur philosophe !

Laurent SCHMITT